Ashvaghosha : Le Chemin de la Sagesse
Le chemin de la sagesse
Le but de cette discipline est de donner à un chercheur l’habitude d’appliquer la pénétration qui lui est advenue comme résultat des disciplines précédentes.
Quand on se lève, qu’on se tient debout, qu’on marche, qu’on fait quelque chose, qu’on s’arrête, on doit constamment concentrer son esprit sur l’acte et sur son exécution, et non sur ses propres rapports avec l’acte, ou son caractère ou sa valeur. Il faut se dire : il y a l’acte de marcher, de s’arrêter, de prendre conscience, et non : je marche, je fais ceci, c’est une bonne chose, c’est désagréable, j’acquiers du mérite, c’est moi qui me rend compte à quel point c’est merveilleux.
C’est de là que viennent les pensées errantes, les sentiments de joie, d’échec ou de malheur. Au lieu de tout cela, il faut simplement pratiquer la concentration de l’esprit sur l’acte lui-même, en comprenant qu’il est un moyen expédient d’atteindre à la tranquillité d’esprit, à la prise de conscience, à la pénétration et à la Sagesse ; et il faut suivre cette pratique dans la foi, la pleine volonté et la joie.
Après une longue pratique, l’asservissement aux vieilles habitudes s’affaiblit et disparaît, et à sa place, apparaissent la confiance, la satisfaction, la vigilance et la tranquillité.
Que se propose d’accomplir ce Chemin de la Sagesse ?
Il y a trois classes de conditions qui nous empêchent de nous avancer le long du sentier de l’Illumination.
Il y a d’abord les attraits provenant des sens, des conditions extérieures et de l’esprit discriminateur.
En second lieu, il y a les conditions intérieures de l’esprit, ses pensées, ses désirs et son humeur.
Tous ces obstacles, les pratiques précédentes (éthiques et mortificatoires) ont pour but de les éliminer.
Dans la troisième classe des obstacles se rangent les incitations instinctives et fondamentales de l’individu (donc les plus insidieuses et persistantes) : la volonté de vivre et de jouir, la volonté de chérir sa personnalité, la volonté de se multiplier, qui donnent naissance à l’avidité et à la cupidité, à la peur et à la colère, à l’engouement, à l’orgueil et à l’égotisme.
La pratique du Paramita de la Sagesse a pour but de maitriser et d’éliminer ces obstacles fondamentaux et instinctifs.
Par ce moyen, l’esprit devient peu à peu plus clair, plus lumineux, plus paisible. La connaissance devient plus pénétrante, la foi s’approfondit et s’élargit jusqu’à ce qu’elles se fondent dans l’inconcevable Samadhi de la Pure Essence de l’Esprit.
À mesure que l’on poursuit la pratique du chemin de la Sagesse, on cède de moins en moins à des pensées de réconfort et de désolation ; la foi devient plus sûre, plus persuasive, plus bienfaisante, et plus joyeuse ; et la peur de la régression disparaît.
Mais ne croyez pas que la consommation finale s’atteigne aisément ni rapidement. Bien des naissances nouvelles pourront être nécessaires.
Tant que persistent les doutes, l’incroyance, les calomnies, la mauvaise conduite, les empêchements du karma, les faiblesses de la foi, l’orgueil, l’indolence et l’agitation mentale, tant que s’en attardent même les ombres, on ne peut atteindre au Samadhi des Bouddhas.
Mais celui qui est parvenu au Samadhi le plus élevé, ou Connaissance Unitive, sera en mesure de prendre conscience, avec tous les Bouddhas, de la parfaite unité de toutes choses sentantes avec le Dharmakaya de l’état de Bouddha. Dans le pur Dharmakaya, il n’y a point de dualisme, ni d’ombre de différenciation. Tous les êtres sentants, si seulement ils pouvaient s’en rendre compte, sont déjà dans le Nirvana. La pure Essence de l’Esprit, c’est le Samadhi le plus élevé, c’est l’Anuttara-samyak-sambhodi, c’est la Prajana Paramita, c’est la Sagesse Parfaite la plus élevée.
Ashvaghosha , orateur et poète célèbre, né en Inde vers le 1er siècle de notre ère. Converti au bouddhisme par Aryadeva (principal disciple de Nagarjuna), Ashvaghosha étudia le Mahayana et composa des oeuvres importantes, dont le Buddhacarita, poème sur la vie du Bouddha, et le Gurupanchasika, les « Cinquante versets de dévotion au Guru », qui est devenu au Tibet le manuel de base pour exposer le comportement que le disciple devrait avoir envers son Maître.
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